Qui succédera à Gabriel Attal à Matignon ? La gauche peine toujours à se mettre d’accord sur un nom, envisageant même trois nouveaux visages.
Mardi 16 juillet, Emmanuel Macron a accepté la démission de Gabriel Attal mais le Premier ministre et son gouvernement démissionnaires restent en poste pour s’occuper des affaires courantes. Le Nouveau Front populaire, arrivé en tête aux législatives, tente toujours de se mettre d’accord sur un nom à proposer pour Matignon. Mais entre-temps, la macroniste Yaël Braun-Pivet a été réélue en tant que présidente de l’Assemblée nationale lors de la première plénière de l’hémicycle. Cette élection, qui s’est déroulée en trois tours, a mis en lumière une possible alliance entre le groupe présidentiel et les Républicains.
Si aucune force politique n’a trouvé de nom ou de candidat définitif pour la fonction de Premier ministre, des noms circulent et pas qu’un peu. À gauche comme à droite, des prétendants se sont fait connaître. Mais lesquels sont susceptibles de réunir une majorité absolue ou un nombre d’élus suffisamment important pour pouvoir éviter une motion de censure ?
L’hypothèse d’un Premier ministre de gauche
Le Nouveau Front populaire est devenu le groupe le plus puissant de l’Assemblée nationale à l’occasion des élections législatives anticipées de 2024, même s’il est dépourvu de majorité. Portée par les résultats du scrutin, l’union de la gauche exige de gouverner et enjoint Emmanuel Macron à nommer un Premier ministre issu de ses rangs. Reste que les différents partis membres de l’union n’ont pas encore trouvé d’accord sur un profil de Premier ministrable dans leurs rangs.
Après plusieurs semaines de négociations, deux noms semblaient se détacher : Laurence Tubiana et Huguette Bello. La première est soutenue par les socialistes, mais une tribune signée dans Le Monde l’a rendue « Macron-compatible », selon les Insoumis, qui voient son appel à se rapprocher d’autres partis d’un mauvais œil. Elle a alors annoncé ce lundi 22 juillet sur les réseaux sociaux qu’elle renonçait à être nommée par le NFP pour le poste de Premier ministre suite aux oppositions qui se sont manifestées au sein de l’alliance de gauche autour de son nom. La seconde n’a pas non plus fait l’unanimité. La présidente du conseil régional de La Réunion et sympathisante de LFI a été proposée par le parti communiste, soutenu par les Insoumis, mais pas par le PS. D’un côté, on soulignait son expérience dans les différentes institutions françaises, et de l’autre on dénonçait son absence à l’Assemblée lors du vote pour le mariage homosexuel en 2013. Des critiques qui l’ont poussée à retirer sa candidature. Pourtant, Olivier Faure mentionnait toujours son nom comme une possibilité au micro de BFMTV-RMC jeudi 18 juillet. Selon Politico, elle aurait même été contactée par Marine Tondelier pour « voir où elle en était ».
Trois nouveaux noms ont alors été évoqués selon Le Monde à l’issue d’une réunion qui s’est tenue ce samedi 20 juillet. D’un côté, André Chassaigne, président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée nationale depuis 2012 et candidat perdant de la gauche lors de la dernière élection pour la présidence de l’Assemblée nationale, pourrait de nouveau tenter de briguer un poste important. Benoit Hamon, actuellement conseiller d’Ile-de-France et président de l’ESS France, chambre de l’économie sociale et solidaire, fait partie des derniers noms ajoutés à la liste. Il avait d’ailleurs affirmé auprès de Politico avoir déjà été approché par le NFP pour les élections législatives mais a, par contre, confié auprès du Monde ne pas être « du tout au courant » que son nom était ressorti en tant que potentiel candidat Premier ministre. Cécile Duflot, ex-ministre écologiste et dirigeante d’Oxfam France, est aussi envisagée.
Ces dernières propositions ont été précédées de bien d’autres. Les Insoumis ont proposé Jean-Luc Mélenchon, qui divise toujours autant la gauche, Clémence Guetté, Manuel Bompard et Mathilde Panot. Chez les socialistes, on a proposé Olivier Faure, Boris Vallaud ou Carole Delga, mais le patron des socialistes a fait marche arrière en proposant Laurence Tubiana. Du côté des écologistes, plusieurs noms sont cités mais sans grande chance d’accéder à Matignon, comme Marine Tonnelier, Cyrielle Chatelain ou Yannick Jadot. Le Nouveau Front populaire pourrait « trancher », « lundi ou mardi » selon la secrétaire générale des Ecologistes, Marine Tondelier, dans les colonnes du Monde.
Mais un Premier ministre de gauche, quel que soit le parti dont il est issu, ne pourra rester à la tête du gouvernement s’il n’obtient le soutien d’une majorité s’étendant au-delà du Nouveau Front populaire. Si quelques personnalités appellent à s’ouvrir à l’aile gauche de la macronie et jusqu’au centre gauche maximum, d’autres s’opposent à une coalition comme LFI ou le patron du PS qui appellent à des majorités par projets. Non seulement de refuser des alliances, le Nouveau Front populaire pourrait souffrir des dissensions entre ses propres membres : LFI et le PS se sont déjà mutuellement accusés de volontairement prolonger les négociations pour fragiliser l’alliance.
La possibilité d’un Premier ministre de coalition
La gauche étant le groupe majoritaire à l’Assemblée nationale, elle pourrait abriter le futur Premier ministre, mais si une coalition voyait le jour et devenait le groupe le plus important en nombre d’élus, c’est elle qui deviendrait un vivier de potentiels chefs de gouvernement. Et une coalition aurait l’avantage de renforcer le Premier ministre en rendant son éviction par une motion de censure plus difficile, mais toujours possible tant que 289 députés ne sont pas réunis dans l’alliance. Plusieurs scénarios de coalition sont sur la table :
Une coalition entre Renaissance et Les Républicains : le camp présidentiel à la tête de la coalition Ensemble compte 168 députés tandis que la droite en a 60, les deux groupes unis cumuleraient donc près de 230 députés et deviendraient majoritaires. Les deux formations politiques se sont déjà entendues sur plusieurs projets depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022 et ont permis de faire voter des lois malgré la majorité relative du camp présidentiel. Une coalition paraît donc possible, mais la droite se montre réticente à de nouveau jouer le rôle de béquille aux élus macronistes. En coulisses, Édouard Philippe, capable de faire le pont entre la macronie et la droite, tente de convaincre les Républicains. De plus, le camp présidentiel et la droite se sont alliés pour l’élection de Yaël Braun-Pivet au perchoir. Si une telle coalition voyait le jour, le Premier ministre pourrait venir du camp macroniste, plus particulièrement de l’aile droite, mais aussi d’un parti du centre droit comme Horizon ou alors de la droite modérée, pourquoi pas un élu comme Aurélien Pradié ? Les Républicains poseraient comme condition à une coalition la nomination d’un Premier ministre de droite sans donner de nom. Reste que certains se positionnent d’eux-mêmes, comme Xavier Bertrand, qui s’imagine à Matignon après avoir construit une coalition impliquant la droite, le camp présidentiel mais aussi la gauche.
Une coalition entre le Nouveau Front populaire et Renaissance : le camp présidentiel ou son aile gauche pourrait aussi se rapprocher de la gauche à condition que LFI, qui fait partie du Nouveau Front populaire, soit exclue de la coalition. Condition pour le moment refusée par une partie de la gauche qui est réticente à s’associer au camp présidentiel. Cette option s’est tout de même éloignée après la réélection de Yaël Braun-Pivet au perchoir.
Une coalition allant de la gauche sociale-démocrate à la droite républicaine : c’est un scénario auquel appelle le camp présidentiel et Emmanuel Macron dans une lettre adressée aux Français le 10 juillet, mais qui paraît difficilement envisageable compte tenu des différences programmatiques entre la gauche et la droite malgré des points d’accord.
L’hypothèse d’un Premier ministre technique
Sans majorité et sans accord de gouvernement, une autre solution est celle de construire un gouvernement technique dirigé par un Premier ministre peu marqué politiquement et pouvant faire consensus de la gauche jusqu’à la droite. Les ministres seraient alors des hauts fonctionnaires, des économistes, des diplomates et des spécialistes de chaque domaine plus que des politiques. Ils seraient chargés de faire tourner le pays et son économie sans apporter de nouvelles grandes mesures ou réformes en attendant de nouvelles élections législatives.
Dans ce cas de figure, la nomination d’un Premier ministre plutôt centriste ou modéré à gauche ou à droite, et surtout expérimenté au rôle de « vieux sage », tient la corde. Des noms comme Dominique de Villepin ou Charles de Courson sont de bons exemples. Il y a aussi la possibilité d’une personnalité apolitique.
Quand le Premier ministre sera-t-il nommé ?
Le futur Premier ministre ne sera pas nommé avant plusieurs jours, cela pourrait même se compter en semaines selon certains. De plus, la démission de Gabriel Attal n’ayant pas été synonyme d’une nomination de son successeur dans la foulée, le Premier ministre restera, temporairement, à la tête d’un gouvernement démissionnaire pour gérer les affaires courantes jusqu’à l’arrivée du nouveau chef du gouvernement et de ses ministres. Cette période pourrait durer le temps nécessaire à la formation d’une coalition ou à la réflexion d’Emmanuel Macron. Le maintien d’un gouvernement démissionnaire jusqu’à la fin des Jeux olympiques de Paris paraît envisageable, et préférable selon des élus du camp présidentiel. D’autres estiment que la durée de vie du gouvernement démissionnaire pourrait aller bien au-delà : jusqu’à l’ouverture de la prochaine session ordinaire à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire jusqu’au 1er octobre. L’hypothèse est évoquée par Le Monde.
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Publish date : 2024-07-22 09:28:00
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