Qui l’aurait imaginé ? Le matraquage de la majorité des médias contre le Nouveau Front populaire imposait à toutes et à tous l’idée que le Rassemblement national l’emporterait. La seule question semblait être : majorité absolue, ou majorité relative ?
Et puis non ! Innombrables, militantes, militants, simple gens, citoyennes, journalistes, influenceuses, syndicalistes, artistes, ont distribué des tracts, parlé à leurs voisins, filmé, fait du porte-à-porte, organisé des rassemblements, écrit, témoigné… Le travail souterrain de la démocratie a avancé à fond.
Et voilà, dimanche 7 juillet, à 20 heures et cinq secondes, le temps que le cerveau comprenne et enregistre, une immense surprise, suivie d’une joie intense a saisi le pays : la France a rejeté le néofascisme !
L’explosion de joie à 20 heures, devant des résultats pour la gauche largement au-delà de ce qu’annonçaient les sondages.
© NnoMan Cadoret / Reporterre
C’est un renversement total de perspective qui s’impose : au lieu de se préparer à résister, il faut se mettre en place de pousser et de soutenir les forces émancipatrices qui ont placé le quotidien, les inégalités, l’écologie au cœur de leur projet.
Les résultats : selon les estimations à 22 heures, le Nouveau Front populaire était crédité d’entre 172 et 181 sièges (estimation Ipsos-Talan pour France Télévisions, Radio France, France 24, RFI et LCP), Ensemble et ses alliés étaient en deuxième position avec de 152 à 166 députés, et le Rassemblement national et ses alliés subiraient un revers, avec 134 à 152 sièges.
Sur la place de la République à Paris, la foule était en liesse. Les gens pleuraient de joie, se prenant dans les bras. Une immense banderole a été déployée sur la statue : La France est tissu de migrations.
L’Assemblée nationale compte désormais trois blocs, avec les partis de gauche en formant le plus grand.
© Nnoman Cadoret / Reporterre
Jean-Luc Mélenchon a été le premier à s’exprimer, depuis un restaurant face au canal de l’Ourcq, à Paris. « Une majorité a fait un autre choix pour le pays », que l’extrême droite, a-t-il dit, affirmant que « le président doit s’incliner » face aux résultats de la gauche, qui devient majoritaire à l’Assemblée. Il a appelé M. Macron à nommer un nouveau Premier ministre issu de l’alliance des partis de gauche. Selon Jean-Luc Mélenchon, le NFP « appliquera rien que son programme, tout son programme », citant l’abrogation de la réforme des retraites, le blocage des prix des produits de première nécessité, une augmentation du Smic, une réforme de l’eau et le moratoire sur les Grands projets inutiles.
« Ça ne fait que commencer »
Peu après, c’est Olivier Faure, du Parti socialiste, qui a salué la victoire de la gauche et des écologistes. « Le NFP a réussi à réunir la gauche et à imposer un front républicain contre le danger de l’extrême droite. Ce vote a permis d’éviter le pire mais ne peut se limiter à être un répit. Il va ouvrir une refondation autour de grands axes. […] Ce vote confère au Front populaire la responsabilité de trouver un chemin pour faire avancer la France et de répondre aux besoins des Françaises, répondre au défi de la guerre, du changement climatique, et des inégalités. »
Depuis le QG des Écologistes, Marine Tondelier s’est réjouie du bond spectaculaire que le groupe de son parti se préparait à faire à l’Assemblée : « La justice sociale a gagné. La justice environnementale a gagné. Le peuple a gagné. Et ça ne fait que commencer. Parce que c’est l’espoir immense créé par cette union de la gauche et des écolos qui est le fait majeur de cette élection. […] Maintenant nous allons gouverner […] Nous allons continuer avec le même état d’esprit que ces derniers jours. On reste calme, on reste solide sur nos appuis, sur nos valeurs. […] Je le dis solennellement. Ce soir, ce n’est pas le moment des postures ni des courses de petits chevaux. Ce n’est pas le moment de proposer un ou une Première ministre, c’est trop tôt. C’est le temps du travail et du collectif. »
© NnoMan Cadoret / Reporterre
Sur le plateau de France 2, Raphaël Glucksman, récemment réélu député européen, a indiqué que l’Assemblée nationale allait retrouver un rôle entier, avec des compromis et des accords possibles comparables avec ce qui se fait au Parlement européen, où aucun groupe n’a de majorité ferme.
Il est clair qu’en France, aucun des trois blocs — la gauche, la droite macroniste et des Républicains, le Rassemblement national — ne peut gouverner seul. Le temps des discussions va s’ouvrir. Et une nouvelle pratique politique, jamais vue dans la Vᵉ République, va s’imposer. La joie est bien là, mais le temps du calme n’est pas pour demain.
Nous avons eu tort.
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Nous nous disions qu’il suffirait que la population et les décideurs politiques soient informés, que les journaux et télévisions s’emparent du sujet, pour que les choses bougent.
Nous savons aujourd’hui que nous avions tort.
En France et dans le monde, l’écrasante majorité des médias est désormais aux mains des ultra-riches.
Les rapports du GIEC sont commentés entre deux publicités pour des SUV.
Des climatosceptiques sont au pouvoir dans de nombreuses démocraties.
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Législatives
L’écologie en péril : retour sur 4 semaines de folie politique
7 juillet 2024 à 21h34
Mis à jour le 8 juillet 2024 à 17h32
Durée de lecture : 4 minutes
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Publish date : 2024-07-07 19:34:00
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