C’est inédit dans l’histoire de la Ve République : l’exécutif pourrait vivre en cohabitation avec une force d’opposition dont la majorité est seulement relative. En arrivant en tête avec 183 sièges, le Nouveau Front populaire a défié les sondages, qui plaçaient le RN gagnant, mais reste loin des 289 sièges requis pour obtenir la majorité absolue à l’Assemblée nationale.
Depuis leur victoire, les formations qui composent le NFP (La France insoumise, le Parti socialiste, les écologistes et les communistes) revendiquent un Premier ministre à leurs couleurs. Après l’annonce des résultats du second tour des législatives, Jean-Luc Mélenchon a déclaré qu’Emmanuel Macron devait « ou bien s’en aller ou nommer un Premier ministre » issu du Nouveau Front populaire. Pourtant, la situation inédite dans laquelle le pays est plongé ne contraint pas forcément le président à faire ce choix.
Selon la Constitution, rien n’oblige le président de la République à nommer le candidat du Nouveau Front populaire, qui sera proposé dans la semaine par la coalition de gauche. « Juridiquement le président n’a aucun encadrement mais il est fortement contraint par la réalité du résultat électoral », nuance Julien Bonnet, professeur à l’Université de Montpellier et président de l’Association française de droit constitutionnel.
Le président pourrait nommer un candidat centriste
« Sur le plan démocratique, il serait curieux que le Premier ministre n’émane pas du groupe majoritaire », mais le professeur de droit n’exclut pas cette hypothèse. « Concrètement il aurait le droit de le faire mais le gouvernement pourrait être éphémère. » En effet, il s’expose à une motion de censure, votée par une majorité des députés, pour le renverser.
Une coalition rassemblant les LR, Ensemble, et des quelques députés des forces du PS, du PC et des écologistes, lui permettrait de nommer un Premier ministre centriste. « J’y crois plus que jamais », a affirmé Yaël Braun-Pivet, l’ancienne présidente de l’Assemblée nationale à l’AFP, plaidant pour une coalition avec « des personnes qui partagent (ses) valeurs et (ses) objectifs », ce qui n’est « ni le cas de LFI ni le cas du RN ».
Autre option envisagée : la formation d’un gouvernement d’experts. Des hauts fonctionnaires comme des membres de la Cour de comptes, des magistrats ou des membres de la société civile pourraient être chargés de gérer les affaires courantes en attendant qu’un consensus politique soit trouvé. Une nouvelle fois, cette solution a ses limites. « La légitimité politique de ce gouvernement d’experts serait faible alors que le gouvernement dispose de grands pouvoirs. Cette hypothèse n’est pas à exclure mais elle causerait une difficulté démocratique si elle était appelée à durer », modère Julien Bonnet.
Une passation de pouvoir loin d’être immédiate ?
Une chose est sûre, ce flottement politique pourrait encore durer quelques jours voire quelques semaines. La Constitution reste muette sur le délai pour nommer le nouveau chef de gouvernement. « Si un gouvernement n’est pas nommé cela risque de créer une difficulté car aucune réforme d’ampleur ne serait engagée et on se contenterait de gérer les affaires courantes ou techniques », alerte cependant le constitutionnaliste.
En attendant, « l’Etat doit continuer de fonctionner ». Dans cette optique, le président a demandé à Gabriel Attal, malgré sa démission, de rester « pour le moment » à la tête du gouvernement afin d’« assurer la stabilité du pays », à quelques jours du début des Jeux Olympiques, selon les informations de l’AFP.
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Publish date : 2024-07-08 15:45:06
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