Dans la presse américaine, un titre croit dur comme fer aux chances de la gauche française d’accéder au pouvoir.
🇺🇸 “Jacobin”
“Plus qu’un pacte de survie”
Depuis l’annonce de la création de l’alliance du Nouveau Front populaire (NFP), le magazine de gauche Jacobin multiplie les articles dithyrambiques à son sujet. Selon lui, “grâce à l’union formée en un temps record, la gauche peut gagner”. Face au rejet massif suscité par Emmanuel Macron et malgré la prépondérance du Rassemblement national, l’alliance de la gauche reste en bonne position en vue du scrutin.
D’autant que, pour le trimestriel new-yorkais, “la possibilité imminente d’un gouvernement d’extrême droite fait que le Nouveau Front populaire est plus qu’un pacte de survie entre les partis”. C’est aussi “un programme qui, non seulement revient sur les politiques les plus agressives des années Macron, mais présente aussi les moyens de créer une ‘rupture’ plus nette avec le statu quo politique et économique”.
Toutefois, la crainte des divisions reste bien présente. Ces deux dernières semaines, la toute nouvelle alliance, née sur les cendres de la Nupes, n’a eu de cesse de tanguer. Entre la purge au sein de La France insoumise lors de l’attribution des investitures, les déclarations fratricides de représentants des différentes composantes de l’union ou encore le ressentiment à l’égard de Jean-Luc Mélenchon, beaucoup auraient pu imaginer voir le NFP sombrer. Mais face à la possibilité, désormais palpable, de voir l’extrême droite diriger le pays, la gauche serre les rangs. “L’élan et l’urgence sont sans doute suffisants pour que les diverses forces en présence fassent bloc”, veut croire Jacobin.
🇺🇸 “The Nation”
Une “résurrection” signée Macron
L’hebdomadaire résolument à gauche The Nation y croit aussi. Si l’annonce de la dissolution par Emmanuel Macron a été surprenante, celle de la création du Nouveau Front populaire l’a été tout autant. “Parmi les nombreuses surprises qu’a provoquées Macron en poussant le pays dans une crise politique préestivale, il y a la résurrection de la coalition de gauche.”
Confrontée à la menace du RN, la gauche a pris de court le président qui comptait sur sa division. “L’espoir est que cette nouvelle alliance relance l’attirance et l’enthousiasme des électeurs pour la gauche et mobilise les abstentionnistes en dissipant l’illusion (soigneusement construite depuis 2017) qui voudrait que les Français n’aient le choix qu’entre Macron et le RN.”
Mais pour gagner, The Nation prévient, il faudra à la gauche “séduire bien au-delà de ses bastions habituels (les grandes villes comme Paris, Marseille, Lyon et Lille, et leurs banlieues) pour conquérir ces circonscriptions rurales où Le Pen n’a cessé de progresser ces dernières années”.
🇩🇪 “Neues Deutschland”
Les “leçons de l’histoire”
“Quand le mythe est réalité.” Neues Deutschland, l’ancien organe officiel du Parti communiste de la République démocratique allemande, pose un regard enthousiaste et ému sur la formation du Nouveau Front populaire en France. Ce dernier fait partie de ces mythes qui “incitent à une mobilisation généralisée et des plus actives. Y compris de la part de groupes qui étaient jusqu’alors unis ou divisés”, écrit le quotidien resté résolument à gauche. Les précédents historiques en Espagne, au Chili et en France, cite le journal, “nous montrent ce qui arrive lorsqu’on ne retient pas les leçons de l’histoire”.
Contrepoint L’économie “fantasmée” de la gauche
La presse économique n’a pas de mots assez durs pour parler du programme du Nouveau Front populaire, qui menacerait la stabilité des marchés et de l’Europe.
Au mieux, la gauche est “insouciante”, au pire, elle mène à la “catastrophe”. Après que l’annonce de la dissolution a secoué les marchés financiers, la perspective d’une victoire du Nouveau Front populaire aux législatives en France déclenche les commentaires alarmistes de la presse économique.
The Economist brocarde “l’insouciance” des mesures annoncées – à gauche comme à l’extrême droite. Pour l’économiste Olivier Blanchard, passé par le FMI, “la frénésie fiscale et budgétaire de l’extrême gauche pourrait conduire à une ‘catastrophe’”. Avec “sa dette publique considérable et son déficit massif”, la France est déjà le mauvais élève européen du dogme budgétaire. Ses finances y sont “plus que jamais exposées à toute entorse”, fait valoir l’hebdomadaire. La hausse de 14 % du salaire minimum coûterait 3,5 milliards d’euros par an, a calculé l’Institut Montaigne (libéral), pour qui plafonner les prix de l’énergie et d’autres produits de consommation “essentiels” ajouterait 24 milliards d’euros par an à la note.
C’est d’une “économie fantasmée” que parlent “les extrêmes à droite et à gauche” en France, juge le Financial Times : ces “politiques économiques populistes, pour la plupart non chiffrées, risquent de faire exploser le déficit budgétaire et la dette de la France”. Elles pourraient conduire à “une crise du marché qui aurait des conséquences sur l’ensemble de la zone euro”. Quant au “programme radical” de la gauche, il promet des dépenses massives, “comme l’abandon de la réforme des retraites de Macron et la hausse des salaires du secteur public”, contrebalancé par une politique fiscale ciblée sur les plus aisés. “Mais il est illusoire de penser qu’un programme d’une telle ampleur ne peut être financé qu’en ponctionnant les riches”, fustige le quotidien britannique.
Le Rassemblement national et le Nouveau Front populaire “sont d’accord sur un point au moins : taxer les riches”, appuie Bloomberg. Élargir l’impôt sur la fortune “constituerait un tournant majeur pour les 13 milliardaires du pays [qui figurent parmi les 500 premières fortunes mondiales]”. De quoi les pousser à l’exil, comme chaque fois que la gauche est arrivée au pouvoir, rappelle le média américain.
Courrier International
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Aujourd’hui, une alliance remarquable allant “du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) jusqu’aux sociaux-libéraux, en passant par la gauche radicale de La France insoumise (LFI) qui souhaite lier luttes sociales et environnementales, ainsi que des communistes de plus en plus sectaires” s’est formée, faisant mentir les cassandres de la gauche. Quant au programme issu des négociations, il intègre des compromis “allant bien au-delà de simples accords de forme”.
🇬🇧 “Morning Star”
“Les intérêts de classe révélés au grand jour”
À Londres, le Morning Star salue une gauche française “consciente que l’alignement sur les libéraux mène à la disparition”. La création du Nouveau Front populaire, dans ce contexte, “offre une alternative au cynique front républicain, dégainé depuis trente ans par les conservateurs en tout genre pour obliger les électeurs de gauche à voter pour eux au nom du barrage contre l’extrême droite”, se félicite le journal socialiste. Cette manœuvre “ne s’est jamais accompagnée d’une stratégie de lutte contre le fascisme, elle n’est qu’un épouvantail pour sauver ce qu’il reste du centrisme”, condamne le quotidien autrefois associé au Parti communiste de Grande-Bretagne.
D’ailleurs, les masques tombent : l’alliance de gauche, “si elle ne promet malheureusement pas de rupture avec le capitalisme”, a débouché sur “un craquèlement du vernis politique, sous lequel se révèlent les intérêts de classe”. Quand le NFP s’engage en faveur des travailleurs, avec l’appui de la société civile, le président des LR préfère s’aligner sur l’extrême droite, avec laquelle certains patrons se disent désormais prêts à dialoguer. “La classe capitaliste et les couches intermédiaires qui la soutiennent ont déjà déclaré la guerre à un potentiel gouvernement de gauche, fustige le Morning Star, et ont signalé leur capacité à s’accommoder d’un éventuel Premier ministre fasciste.”
🇪🇸 “El Salto”
“Une rupture avec le néolibéralisme”
Samedi 15 juin, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont défilé dans toute la France pour dire non à l’extrême droite. Ces manifestations “ont donné le coup d’envoi à la campagne du Nouveau Front populaire”, résume El Salto, un site espagnol alternatif et indépendant. La peur de voir le Rassemblement national au pouvoir qui s’est exprimée dans les cortèges donne de l’élan à la coalition de gauche.
Mais pas seulement. “Outre une plus grande mobilisation chez les jeunes, la gauche bénéficie d’une implication accrue des syndicats et des associations”, observe le journal de gauche, qui note que plusieurs associations et organisations syndicales sont sorties de leur neutralité habituelle pour appeler à choisir la coalition de gauche.
“La reprise d’une alliance unitaire de gauche a été le mouvement le plus notable des dix derniers jours de vertige informationnel”, juge El Salto, qui salue “un programme socio-écologique ambitieux et une rupture avec le néolibéralisme”. Même si le site espagnol s’inquiète des controverses au sein du NFP qui “ont mis à nu les coutures d’une coalition fragile”.
Source link : https://www.courrierinternational.com/article/vu-de-l-etranger-nouveau-front-populaire-les-medias-engages-veulent-y-croire
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Publish date : 2024-06-27 03:00:22
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