À quelques jours du premier tour des élections législatives, le vrai ou faux se pose une question : les mesures que les partis politiques proposent sont-elles applicables ? Ce jeudi, on s’intéresse à la proposition du Nouveau Front populaire de bloquer les prix.
Publié le 27/06/2024 09:48
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Les leaders du Nouveau Front populaire lors de la pr »éentation de l’union de la gauche pour les élections législatives, le 14 juin 2024. (MOHAMMED BADRA / EPA)
Dans son programme pour les législatives, le Nouveau Front populaire, l’alliance de gauche, annonce qu’elle souhaite « bloquer les prix des biens de première nécessité dans l’alimentation, l’énergie et les carburants ». Depuis 1986, les prix ne sont plus décidés par l’État, mais par les entreprises, qui les déterminent en fonction de leurs concurrents. Actuellement, le code du commerce permet toutefois à l’État d’agir sur les tarifs sous plusieurs conditions.
La première, en cas de « situations de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement », ou « de dispositions législatives ou réglementaires ». C’est actuellement le cas notamment dans les départements et territoires d’outre-mer, qui sont de fait sous le coup d’un quasi-monopole d’un armateur, qui importe des produits par bateau. Pour éviter qu’il en profite trop, l’État plafonne certains prix dans l’alimentaire, dans les magasins de bricolage et aux pompes à essence.
Par ailleurs, l’État peut aussi prendre des mesures temporaires « contre des hausses ou des baisses excessives de prix » en cas de « situation de crise, circonstances exceptionnelles, calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché », indique le code du commerce. En 1990, la dernière fois que le gouvernement a bloqué les prix du carburant, le cours du pétrole avait, par exemple, bondi de 160% en deux mois. Pendant le Covid, c’est notamment cette disposition qui avait permis au gouvernement de fixer un prix maximal pour le gel hydroalcoolique et les masques.
Il faudrait donc que le Nouveau Front populaire démontre une situation de crise sur le plan du pouvoir d’achat pour justifier une exception à la liberté des prix et de la concurrence. En 2023, l’économie française a subi 5% d’inflation en moyenne, ce qui est beaucoup, même si la France a déjà connu beaucoup plus. Mais le texte du code de commerce ne définit pas précisément ce qu’est une « situation de crise » ou des « circonstances exceptionnelles ». La liberté d’interprétation est laissée au juge administratif.
S’il accède au pouvoir, le Nouveau Front populaire peut de toute façon proposer au Parlement la modification du code de commerce. Mais le droit européen veille à la libre circulation des marchandises. Or, un blocage des prix en France pourrait ralentir les importations d’autres produits européens vers la France, et la Cour de justice de l’Union européenne a ainsi considéré, dans une décision de 1979, que le blocage des prix était « contraire au principe de libre circulation des marchandises », rappelle Jean-Paul Markus, professeur de droit public, sur le site Les Surligneurs.
C’est à ce titre que la France avait été condamnée en 1992, à cause du prix du tabac fixé par décret. Philipps Morris et Rothmans, qui avaient saisi le Conseil d’État, avaient obtenu gain de cause. Et c’est aussi en s’appuyant sur le droit européen que le Conseil d’État avait annulé en 2017 un décret sur les tarifs réglementés du gaz. En revanche, il existe encore pour l’électricité.
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Publish date : 2024-06-27 07:48:53
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