Imbroglio sur les retraites
Une chose est sûre, la liste des dépenses est impressionnante, même si elle est en retrait par rapport au programme des Insoumis en 2022. Ils proposaient alors 250 milliards sur cinq ans, voire 332 milliards selon l’Institut Montaigne.
La décrue s’explique notamment par la décision de ne pas inclure le retour à la retraite à 60 ans. Cet objectif du NFP a provoqué de vives tensions entre Insoumis et socialistes. Finalement, les modalités de la réforme seront arrêtées après concertation avec les syndicats et elle ne s’appliquera pas d’ici à 2027. L’enjeu est de taille : l’Institut Montaigne l’avait chiffrée à 36 milliards d’euros.
En revanche, la réforme Macron repoussant l’âge de départ de 62 à 64 ans sera bien abrogée, ainsi que celle de l’assurance-chômage. Valérie Rabault estime que cela ne coûterait que 5 milliards, alors que, selon l’Unédic et Bercy, les deux réformes devaient rapporter quatre fois plus.
150 milliards de hausses d’impôts
Les autres mesures coûteuses sont le blocage des prix de l’énergie, qui devrait être compensé aux producteurs, ou la hausse des salaires des fonctionnaires. Certaines propositions paraissent peu réalistes, comme la création de 500 000 places en crèche, au vu des difficultés de recrutement. D’autres sont trop floues pour être chiffrées, comme les embauches de fonctionnaires ou le plan rail.
Par « souci de crédibilité », ces dépenses sont censées être compensées par de nouvelles recettes. « Notre objectif n’est pas de financer nos mesures par le déficit », a martelé Eric Coquerel, qui dit ne pas avoir pris en compte l’éventuel impact positif des nouvelles dépenses sur la croissance. Une autre différence avec 2022. A l’époque, les Insoumis tablaient sur 62 milliards d’euros de rentrées supplémentaires grâce à l’accélération de la croissance, en plus des 205 milliards dégagés par la « révolution fiscale ».
Cette fois, les hausses d’impôts seraient limitées à « seulement » 150 milliards. Mais le programme n’en détaille que 120. Et des doutes demeurent sur le chiffrage des mesures. Ainsi, il est prévu de réinstaurer un impôt sur la fortune, doté d’un malus climatique. L’Institut Montaigne l’avait évalué à 3,5 milliards. Or la gauche en attend 15 milliards car elle souhaite taxer les actifs professionnels, aujourd’hui exonérés.
« 150 milliards, c’est aberrant »
De même, le durcissement des droits de succession, assorti d’un héritage maximal à 12 millions, avait été chiffré par l’Institut Montaigne à 9 milliards, contre 17 pour le NFP. Enfin, les Insoumis ont remis sur le tapis leur impôt mondial sur les multinationales, à 25 %, estimé par l’Institut Montaigne à 18 milliards, au lieu de 26 dans le programme.
Au-delà des querelles de chiffres, un tel choc risque d’accroître l’évasion fiscale, de provoquer l’exil de contribuables aisés, la délocalisation d’entreprises ou leur vente à des étrangers. De quoi atténuer les recettes et peser sur la croissance.
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Par ailleurs, nombre d’experts doutent de la pertinence d’une relance par la dépense publique, alors que l’Hexagone est déjà champion de l’OCDE (57,3 % du PIB). « La France n’est pas en récession, à la limite les économistes pourraient débattre d’une relance ciblée de 10 à 20 milliards, estime François Ecalle, président de Fipéco, passé par Bercy et la Cour des comptes. Mais, à 150 milliards, c’est aberrant. »
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Publish date : 2024-06-25 14:00:00
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