POLITIQUE – Historique. La Nouvelle-Calédonie va envoyer son premier élu indépendantiste à l’Assemblée nationale depuis 1986. Les habitants de l’archipel ont tranché ce dimanche 7 juillet, à la faveur du second tour des élections législatives, et ont décidé d’être représentés par Emmanuel Tjibaou, 48 ans. Il bat nettement le loyaliste Alcide Ponga, marqué à droite, avec 57,44 % des voix.
L’exploit est d’autant plus impressionnant que depuis 1986 et le redécoupage de la carte électorale par le ministre de l’Intérieur Charles Pasqua, la circonscription était réputée ingagnable pour les indépendantistes. La très forte participation (à plus de 73 %) a joué en faveur. L’élection d’Emmanuel Tjibaou s’inscrit dans un contexte politique tendu, mais plutôt favorable aux indépendantistes. Il y a moins d’un an, Robert Xowie, membre du même courant politique, était propulsé au Sénat.
Emmnanuel Tjibaou s’est exprimé peu après sa victoire. Très ému, la voix presque tremblotante, il s’est dit « impressionné par la mobilisation » mais aussi « par la situation dans laquelle notre pays est plongé aujourd’hui ». Selon lui, son élection est à interpréter comme « un appel à l’aide, un cri d’espoir. » « Il faut recréer les conditions du dialogue », a-t-il enfin estimé.
Fils de Jean-Marie Tjibaou, figure de l’indépendantisme kanak
Le député sortant Nicolas Metzdorf, loyaliste, avait fait le choix de se présenter dans une autre circo de Nouvelle-Calédonie. Sentait-il le vent tourner ? De fait, le coup de tonnerre auquel personne ne croyait il y a quelques jours encore ne vient pas de nulle part.
À la mi-mai, la Nouvelle-Calédonie a été secouée par de fortes contestations, sur fond de réforme de la loi électorale. Huit personnes sont mortes dans les violences, et un couvre-feu a été maintes fois prolongé la nuit. En ce week-end électoral, les autorités avaient interdit tout rassemblement et mis en place « un dispositif de sécurité » spécifique pour éviter les débordements.
Emmanuel Tjibaou, candidat soutenu par le FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste), s’impose donc dans ce territoire du Pacifique sud. Si son nom ne dit probablement rien en métropole, il est très symbolique localement. Emmanuel est le fils de Jean-Marie Tjibaou, figure majeure de l’indépendantisme kanak, assassiné en 1989. Son frère Joël a quant à lui été mis en examen et placé en détention provisoire en juin pour sa participation supposée aux émeutes.
Son élection a été applaudie par quelques personnalités de gauche. Le député européen de La France insoumise Younous Omarjee a adressé ses « chaleureuses et sincères félicitations à Emmanuel Tjibaou pour sa brillante élection, d’une si grande portée tant politique que symbolique ». Le député LFI-NFP de Seine-Saint-Denis Bastien Lachaud parle d’une « élection historique qui démontre l’aspiration du peuple à la dignité et l’émancipation » et déclare avoir « hâte de pouvoir travailler avec lui à l’Assemblée nationale ».
La dernière fois qu’un élu indépendantiste a siégé au Palais Bourbon, c’était avec Rock Pidjot, de 1964 à 1986. Trente-huit ans plus tard, les kanaks auront de nouveau une voix pour les représenter à Paris.
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Publish date : 2024-07-07 13:27:42
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