Mélenchon veut-il vraiment que le Nouveau Front populaire l’emporte ?

Mélenchon veut-il vraiment que le Nouveau Front populaire l’emporte ?

Comme la plupart de mes compatriotes, j’étais scotché devant mon écran de télévision, dès l’annonce des résultats du premier tour des élections législatives, ce dimanche 30 juin. Changeant systématiquement de chaîne, j’écoutais les commentaires des journalistes, j’observais la fébrilité des politiques qui avaient été invités par les différentes rédactions, les uns faisant grise mine, les autres se réjouissant des résultats obtenus.

Certains échanges étaient courtois, d’autres beaucoup plus agressifs. Mais, les plateaux sont une chose et les directs en sont une autre. Priorité au direct sur les chaînes d’infos, lorsque l’on coupe la parole d’un invité et que, subitement, l’on voit Édouard Philippe à l’écran, Marine Le Pen, Jordan Bardella, Gabriel Attal ou Jean-Luc Mélenchon. Il y aurait à décortiquer les attitudes, les mines satisfaites, graves ou déconfites, de chacun d’entre eux.

Mais, une scène m’a plus intrigué que d’autres. Car, c’est l’une des images fortes de cette soirée électorale. Jean-Luc Mélenchon n’a pas tardé à réagir, avant que les autres ténors du Nouveau Front populaire ne le fassent. J’oserai même dire, en lieu et place, d’autres, comme pour affirmer un peu plus sa mainmise sur le Nouveau Front populaire.

Mélenchon lit son texte et proclame solennellement que « nulle part, nous permettrons au RN de l’emporter et c’est pourquoi dans l’hypothèse où il serait arrivé en tête et que nous ne serions qu’en troisième position, nous retirons notre candidature ». « En toutes circonstances, où que ce soit et dans quelque cas que ce soit, notre consigne est simple, directe et claire, pas une voix, pas un siège de plus pour le RN », proclame le leader des Insoumis. Mais, qui l’autorise ainsi à réagir ? Se veut-il le porte-parole de toute la gauche, le chef d’orchestre, celui qui dicte la consigne et la ligne à suivre ?

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À la droite de Mélenchon, se tient le très médiatique Manuel Bompard, le coordinateur de La France insoumise. Or, ce fidèle de Mélenchon vient d’être réélu député LFI avec plus de 67 % des voix. À sa gauche, à la place de Manon Aubry ou de Mathilde Panot, présente sur le plateau de TF1, se tient la juriste franco-syrienne, d’origine palestinienne, Rima Hassan, fraîchement ralliée aux Insoumis. Elle apparaît couverte d’un keffieh, cette pièce de tissu à carreaux blancs et noirs, qui revêt une signification particulière, puisqu’elle est l’emblème par excellence de la cause palestinienne, à travers le monde.

Or, cet accessoire hautement symbolique est porté par nombre de manifestants pro-palestiniens, à Paris et dans d’autres villes, aux côtés des innombrables drapeaux palestiniens.

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Que fait l’eurodéputée sur l’estrade, alors qu’elle n’a pas de responsabilité au sein de LFI ?

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Que fait l’eurodéputée sur l’estrade, alors qu’elle n’a pas de responsabilité au sein de LFI ?

Convenons d’abord qu’elle n’y serait pas, si Jean-Luc Mélenchon n’avait pas tenu à ce qu’elle y soit. Or, Mélenchon orchestre particulièrement et finement sa communication politique.

À l’intérieur de LFI, qui n’est pas à proprement parler un parti politique, mais un mouvement sans adhérents, il dicte ses conditions, plante le décor, choisit la stratégie, hausse le ton et/ou purge certains de ses anciens compagnons de route. Or, Rima Hassan était sa pièce maîtresse pendant les européennes. La cause palestinienne ayant été au cœur de la campagne LFI, Rima Hassan avait comme probable fonction de rassembler une partie de l’électorat des Français de confession musulmane et de convaincre de jeunes urbains.

De plus, Rima Hassan est la coqueluche de Mélenchon et peu importe qu’elle soit une activiste, plutôt violente d’ailleurs. Voilà au contraire, un point qui doit jouer en sa faveur. Peu importent les accusations qui fusent, les suspicions d’antisémitisme dont on l’accuse et les mensonges éhontés qu’elle colporte sur son compte X. Ce n’est peut-être pas, aux yeux de Jean-Luc Mélenchon, ni moins grave, ni plus grave que les suspicions d’antisémitisme dont on l’accuse personnellement et/ou LFI. Mélenchon semble même s’accommoder d’un antisémitisme d’atmosphère.

Jean-Luc Mélenchon a plus à perdre d’une victoire du NFP et plus à gagner d’une victoire du RN

En la présence de Rima Hassan, il y a peut-être une autre signification. Incontestablement, pour les électeurs modérés du NFP et les sociaux-démocrates dont je suis, elle est plus un repoussoir qu’autre chose. Parce qu’elle exprime une radicalité qui est à contre-courant d’une gauche qui se voudrait responsable. Elle est un repoussoir chez celles et ceux qui estiment qu’elle provoque une incroyable tension dans la société française en voulant importer des passions et des colères et en suscitant une hystérisation autour de ce conflit lointain.

La montrer, c’est aussi rappeler qu’au fond, Mélenchon est le maître d’œuvre d’une autre stratégie. S’il n’est pas Premier ministre, en quoi cette élection le concerne-t-elle vraiment ? Lui, qui ne pense qu’à la présidentielle de 2027 ? Au fond, il me semble que Jean-Luc Mélenchon a plus à perdre d’une victoire du NFP et plus à gagner d’une victoire du RN, qui lui permettrait de s’ériger en son opposant principal et de mobiliser les troupes dans une confrontation qui se déroulerait dans nos rues. Et, c’est là toute la stratégie de Mélenchon, ne pas faire gagner la gauche.

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Publish date : 2024-07-01 13:37:50

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