4 jours. C’est ce qu’il aura fallu au Nouveau Front Populaire pour élaborer un programme politique pour les législatives du 30 juin 2024, faisant suite à la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron.
Le programme comprend plus de 150 mesures, en trois temps d’action :
Les 15 premiers jours : la ruptureLes 100 premiers jours : l’été des bifurcationsLes mois suivants : les transformations
Le programme reprend sans surprise de nombreux éléments du programme élaboré pour la NUPES lors des législatives 2022, mais il y a tout de même des changements très importants deux ans après.
Pour comprendre la tendance politique, l’analyse des propositions des partis politiques pour les européennes est utile. Non seulement c’est un sujet qui revient souvent dans le programme du Nouveau Front Populaire, mais cela permet également de voir que certains points de désaccord (comme le nucléaire) n’existent plus dans ce nouveau programme.
Analyse du programme écologique du Nouveau Front Populaire
L’analyse ci-dessous se consacrera à deux thèmes cruciaux : le climat et la justice sociale. Ces deux éléments sont indispensables pour atteindre la neutralité carbone et tendre vers une société soutenable. Le programme du NFP est très clair en ce sens, et dès les 15 premiers jours :
Nous adopterons immédiatement 20 actes de rupture pour répondre à l’urgence sociale, au défi climatique, à la réparation des services publics, à un chemin d’apaisement en France et dans le monde. Pour que la vie change dès l’été 2024.
Pour faciliter la lecture, l’analyse se fera par secteur, puis abordera le financement du programme du NFP.
Transports et mobilité
Dans les 15 premiers jours, la première mesure du programme concernant les transports est de “décréter un moratoire sur les grands projets d’infrastructures autoroutières”. C’est une excellente mesure, puisqu’aucun projet d’infrastructures ne devrait voir le jour sans un rationnel chiffré et argumenté. Est-ce que le projet de l’autoroute A69 en fait partie ? Si l’on considère que c’est encore un projet, oui. On imagine que cela a dû coûter à la socialiste Carole Delga, fervente défenseuse du projet de l’A69, de rejoindre le Nouveau Front Populaire.
Dans les mois, suivants, il est souhaité de “développer les transports publics et écologiques“, “garantir des tarifs accessibles et des mesures de gratuité ciblée (jeunes, précaires, etc) dans les transports publics et baisser la TVA sur la tarification des transports en commun à 5,5 %” et de “mettre en place un plan rail et fret, créer des services express régionaux, adopter un moratoire sur la fermeture des petites lignes et les rouvrir dès que possible, revenir sur la privatisation de Fret SNCF“
Comparé au programme du gouvernement Macron et du Rassemblement National, le NFP met l’accent sur les transports publics et en facilite l’accès pour les plus jeunes et plus précaires. Rappelons que d’après le dernier rapport du Haut Conseil pour le Climat, les émissions des transports représentent 34% sur le territoire français. Une priorité que tous les partis devraient prendre en compte.
Il manque dans le programme des clarifications sur le secteur aérien. Mis à part une mention dans la partie “Les Outre-mer, avant-postes de la planification écologique” avec la proposition de “réglementer les tarifs de desserte aérienne”, l’avion n’est pas mentionné, même si c’était le cas dans les programmes des 3 partis principaux pour les européennes. La taxe sur le kérozène n’est pas non plus mentionnée, mais nul doute que le sujet sera mis sur la table si le NFP remporte les législatives.
Si l’accent est mis sur l’accès aux transports publics, la place de la voiture individuelle n’est pas évoquée, alors que le message est pourtant très clair : “l’avenir de la voiture sera assurément électrique, mais la voiture individuelle ne doit pas être l’avenir de notre mobilité“. Inutile de chercher cela chez le gouvernement Macron qui “adore la bagnole” ou chez le RN qui malgré les recommandations scientifiques, évoque une baisse du nombre de voitures en circulation comme de l’écologie punitive“.
Biodiversité et bien-être animal
Si réchauffement climatique et effondrement de la biodiversité vont de pair, ce dernier sujet n’est pour autant pas considéré de la même façon par les partis. Le NFP y consacre une partie entière, contrairement au gouvernement Macron qui n’a jamais pris le sujet au sérieux et au Rassemblement National qui n’y accorde aucune importance.
Dans son programme, 3 points principaux reviennent, et sont tous d’une importance cruciale :
Défendre les zones agricoles, naturelles et les zones humides, doubler et améliorer la protection des aires maritimes protégées. Nous avons un article entier consacré au sujet sur Bon Pote, qui montre leur importance et l’hypocrisie dont fait part le gouvernement Macron sur le sujet.Protéger la forêt en garantissant la diversité des essences, avec une filière sylvicole respectueuse de la biodiversité et des sols, garantissant les qualifications et les emplois des forestiers. Un autre sujet clef puisque nos puits de carbone sont en très grande souffrance et que cela nous éloigne de nos objectifs climatiques.Rétablir les milliers de postes supprimés dans le service public de suivi et de protection de la nature : à l’Office national des forêts, à l’Office français de la biodiversité, à Météo France, au Cerema.
Ce dernier point est indispensable. En juin 2023, le Haut Conseil pour le Climat rappelait que la France n’était pas prête pour affronter le changement climatique. Au lieu d’augmenter les budgets et les effectifs, le gouvernement Macron a accéléré la baisse des effectifs chez Météo France, à l’Office National des forêts (ONF), etc. Les beaux discours ne sont rien face à la réalité des chiffres :
Rompre avec la maltraitance animale
Concernant le bien-être animal, le programme du Nouveau Front Populaire est sans surprise le meilleur possible. Cela rejoint les propositions qui étaient faites pour les élections européennes, où le Rassemblement National était tout simplement une catastrophe sur le sujet.
Le NFP propose notamment de “sortir des fermes-usines, améliorer le bien-être animal et interdire l’élevage en cages d’ici la fin de mandature“.
Justice sociale, pouvoir d’achat et taxation des plus aisés
C’est ce qui sépare probablement le plus les programmes. Le NFP est le seul à proposer un programme qui met la justice sociale au cœur de sa campagne, contrairement au gouvernement Macron ou au Rassemblement National pour qui ce n’est pas un objectif. Rappelons que la justice sociale est indispensable pour tendre vers une société soutenable, ce sont les conclusions du dernier rapport du GIEC et non les lubies d’un groupuscule d’extrême gauche.
Le programme prévoit notamment de :
Au niveau européen, le programme prévoit également de “taxer les plus riches pour augmenter les ressources propres du budget de l’Union européenne” et de “généraliser de la taxation des superprofits”.
C’est donc un idéal de société totalement différent du programme du gouvernement Macron et du Rassemblement National, qui refusent eux de taxer plus les hauts revenus. Le programme du NFP prévoit de taxer les plus riches pour financer la transition écologique, ce qui est non seulement justifiable d’un point de vue économique mais aussi et surtout un impératif social et écologique.
Logement et rénovation énergétique : le programme du Nouveau Front Populaire à la hauteur
Lutter contre la précarité énergétique devrait être une priorité de tous les partis politiques.
La précarité énergétique touche 11 millions de personnes en France, et les premières victimes sont les ménages les moins aisés. D’après la Fondation Abbé Pierre, la France compte 8 millions de logements passoires thermiques. L’enjeu est de taille : 16% des émissions en France proviennent des bâtiments.
Le programme du NFP est ambitieux sur le sujet, plus ambitieux que le gouvernement Macron (qui a coupé des budgets à plusieurs reprises dans la rénovation thermique des bâtiments) ou que le Rassemblement National qui étant pro-énergies fossiles, n’en fait pas une priorité. Jordan Bardella vient par ailleurs de déclarer qu’il souhaitait lever “les interdictions liées au DPE” pour la location et la vente de biens“. Un souhait qui toucherait à nouveau les plus précaires en priorité, une habitude avec l’extrême droite.
Pas de surprise à ce niveau non plus, EELV, LFI et PS/Place Publique avaient également les programmes les plus ambitieux sur le sujet pour les européennes.
La mesure phare est “d’assurer l’isolation complète des logements, en renforçant les aides pour tous les ménages et garantissant leur prise en charge complète pour les ménages modestes“. A ce titre, un article est disponible sur Bon pote pour connaître en quelques clics les aides de l’État pour rénover son logement.
Energie… et débats : que dit le programme du Nouveau Front Populaire ?
La partie énergie est probablement celle qui génèrera le plus de débat.
D’abord, les mesures claires du programme, qui sont pour la plupart d’excellentes initiatives :
Faire voter une loi énergie-climat : rappelons que le gouvernement Macron a plus d’un an de retard sur de nombreux sujets clefs alors que cela devrait être une priorité, comme l’a rappelé le Haut Conseil pour le Climat dans une lettre adressée à Gabriel Attal en avril.Inscrire le principe de la règle verte : c’est une proposition qui faisait partie du programme de l’Avenir en Commun en 2022 et reprise par LFI pour les européennes 2024. Cela signifie “ne pas prélever sur la nature plus de ressources renouvelables que ce qu’elle peut reconstituer, ni de produire plus de pollutions et de déchets que ce qu’elle peut supporter“. C’est inédit, et cela méritera un article dédié pour une possible mise en application (après le 7 juillet donc).Mettre en place un plan climat visant la neutralité carbone en 2050 : le gouvernement est très en retard sur la SNBC3.“Bloquer les prix sur le carburant” ?
Ensuite, notons que la première des 150 mesures du programme est de “bloquer les prix des biens de première nécessité dans l’alimentation, l’énergie et les carburants par décret, et renforcer le bouclier qualité-prix pour les outre-mer“. Le gel des prix et les ristournes à la pompe ne sont pas des solutions sur le long terme pour la transition écologique. De plus, les remises profitent davantage aux plus aisés.
L’urgence, c’est de sortir les Français de leur dépendance à la voiture individuelle et d’offrir des alternatives. Quand vous n’avez pas d’autre choix que de prendre votre voiture, ce n’est pas la liberté, c’est une prison.
Le programme du Nouveau Front Populaire prévoit également de revenir sur la taxe Macron de la hausse de l’électricité début 2024, ce qui est une très bonne initiative comme nous l’avions expliqué sur Bon Pote. Enfin, ils souhaitent annuler la hausse des prix du gaz, un mauvais signal dans le cadre de la transition écologique.
Sur les moyens de productionRenforcer la structuration de filières françaises et européennes de production d’énergies renouvelables (de la fabrication à la production)Faire de la France le leader européen des énergies marines avec l’éolien en mer et le développement des énergies hydroliennes : concernant l’éolien en mer, c’est tout à fait justifié si nous regardons les différents scénarios RTE (avec ou sans nucléaire, il y a une hausse de l’éolien en mer). En revanche, LFI est très (trop !) optimiste concernant les énergies hydroliennes comme l’ont déjà fait remarquer de nombreux expertes et experts sur le sujet.Refuser la privatisation des barrages hydroélectriques : pour rappel, l’Etat propriétaire des barrages a pour concessionnaire à 80 % l’entreprise EDF, dont elle est également propriétaire.
Sur la privatisation des barrages hydroélectriques, Nicolas Goldberg précise pour Bon Pote “qu’EDF y est opposé, préférant que l’État lui cède les barrages. En l’état du droit européen, a minima via un régime de quasi-régie, le refus de la mise en concurrence est possible. La cession des barrages voulue par EDF est en revanche plus sujet à un chemin juridique à trouver”.
Le NFP dispose donc des moyens d’appliquer cette mesure et pourrait préciser quelle est la voie qu’il souhaiterait privilégier.
Le nucléaire, grand absent du programme ?
Alors que le nucléaire a tendance à être au cœur de la majorité des débats sur l’énergie en France, il n’est pas évoqué dans le programme du Nouveau Front Populaire. La seule mention souhaite “revenir sur la fusion entre l’Agence de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de recherche sur la sûreté nucléaire (IRSN)“. Vous pouvez à ce sujet lire deux articles de Michaël Mangeon ici et ici, et lire un article sur la sûreté nucléaire et le changement climatique sur Bon Pote.
La sortie progressive du nucléaire souhaitée par LFI et EELV n’est donc plus d’actualité. Cela signifierait également qu’aucun réacteur ne serait fermé prématurément. Le programme reste flou sur le sujet, comme Raphaël Glucksmann et son programme pour les élections européennes 2024. Un sujet important qui méritera également une analyse après le 7 juillet si le NFP remporte les législatives.
L’industrie au centre de tout ?
Côté industrie, on retrouve également les propositions des 3 programmes pour les européennes avec certains pré-requis et conditions que vous ne retrouvez pas dans le programme du gouvernement Macron et du Rassemblement National. En voici les différents points :
Engager un plan de reconstruction industrielle pour mettre fin à la dépendance de la France et de l’Europe dans les domaines stratégiques (semi-conducteurs, médicaments, technologies
de pointe, voitures électriques, panneaux solaires, etc)Réaliser un diagnostic préalable des ressources naturelles avant implantation industrielleConditionner les aides aux entreprises au respect de critères environnementaux, sociaux et de lutte contre les discriminations au sein de l’entreprise. Les inscrire dans une stratégie industrielle publique. Exiger le remboursement des aides en cas de non-respect des contreparties. Ce point est particulièrement important lorsque l’on sait que l’Etat verse plus de 160 milliards par an aux entreprises, sans condition. A lire dans la partie “financement” de cet article.
Comme précisé par Anaïs Voy-Gillis, l’industrie peut être ce qui nous rassemble puisqu’elle reste au centre de tout. “La clé est dans la redécouverte d’un dialogue possible entre des mondes différents, vivant des réalités quotidiennes opposées. Il n’y aura pas de réponse collective au changement climatique sans poser la question sociale. Or, l’industrie peut être celle qui nous rassemble puisqu’elle reste au centre de tout.”
Banques : la fin de la récré fossile ?
Ce que prévoit le programme du Nouveau Front Populaire pour les banques est un changement radical. Contrairement au programme du gouvernement Macron et du Front National qui sont sur la même ligne, le programme souhaite renforcer les taxes sur les transactions financières mais aussi et surtout en finir avec les énergies fossiles. Voici les principales propositions :
Réglementer la banque et la finance pour éviter de nouvelles crises et financer l’économie réelle :Augmenter les réserves des banques pour faire face aux risques climatiques.Zéro financement des banques pour les énergies fossiles.
en commençant par les nouveaux projets.Taxation renforcée des transactions financières.Créer un pôle public bancaire s’appuyant sur la Caisse des Dépôts et Consignations et la Banque Publique d’Investissement qui aura notamment pour tâche d’affecter la collecte de l’épargne réglementée vers les besoins sociaux et écologiques.
Trop peu a été entrepris pour limiter le financement des énergies fossiles par les banques. Les banques françaises ont atteint des records de financement aux énergies fossiles après l’Accord de Paris, réalisé des milliards et malgré les beaux discours, rien n’a été concrètement fait pour arrêter cela, que ce soit de la part du gouvernement Macron ou de l’Union Européenne. Sans changement de paradigme et interdiction formelle, les banques ne changeront jamais de business model et n’arrêteront jamais leur financement aux énergies fossiles.
Révolutionner l’agriculture
Le programme du Nouveau Front Populaire est de très loin le plus exhaustif concernant les propositions sur l’agriculture.
Dans les 15 premiers jours, le programme du Nouveau Front populaire souhaite “engager les négociations commerciales en garantissant un prix plancher et rémunérateur aux agriculteurs et en taxant les superprofits des agro-industriels et de la grande distribution“. Ce point ne fait pas l’unanimité auprès des économistes et nécessite des précisions : un prix plancher sur quels produits ? Quelles régions ?
Ce sujet crucial exigerait que tous les partis politiques soient à même de proposer des solutions. Il est inadmissible que des millions de Françaises et Français hésitent entre se chauffer et manger pendant que le nombre de millionnaires et milliardaires explose dans notre pays.
Le programme propose également de réformer la Politique agricole commune (PAC), comme c’était le cas pour LFI, EELV et PP aux élections européennes 2024. Inutile de rappeler que le Rassemblement National a à nouveau le pire programme sur l’agriculture, lui qui a voté l’accord final entérinant la réforme de la PAC.
L’eau enfin prise au sérieux
Le programme du Nouveau Front Populaire est le plus important concernant l’enjeu de l’accès à l’eau. Ils souhaitent “mettre en place des règles précises de partage de l’eau sur l’ensemble des activités“, et “aller vers la gestion 100% publique de l’eau en régies locales: pour la gratuité des premiers mètres-cubes indispensables à la vie et la tarification progressive et différentielle selon les usages“.
L’économiste Timothée Parrique revient sur cette mesure :
Ce que propose le Nouveau Front populaire, c’est d’accompagner ce mouvement de démarchandisation de l’eau. Des instances locales qui permettent des délibérations démocratiques pour déterminer les bons usages et les mésusages (un mécanisme primordial en période de pénurie d’eau), ainsi qu’un système de prix sensible aux consommations et au pouvoir d’achat de chacun.
Concernant la tarification progressive, c’est également une mesure de justice sociale. “Pourquoi payerait-on son eau au même prix pour faire son ménage ou remplir sa piscine privée ?” précise Timothée Parrique.
Le NFP propose également de :
Atteindre durant le mandat le très bon état écologique et chimique de tous les cours d’eau (fleuves, rivières, ruisseaux) et réserves souterraines et faire contribuer les industriels à la dépollution des nappes et des sols.Mailler le territoire de fontaines à eau, de douches et de sanitaires publics et gratuits.
Enfin, l’une des mesures phares est “d’adopter un moratoire sur les méga-bassines“. Si vous souhaitez en savoir plus sur les méga-bassines, un article complet est disponible sur Bon Pote.
Pour une agriculture écologique et paysanne
Dans la suite du programme, vous retrouverez de nombreuses mesures qui sont une réelle rupture de l’action du gouvernement Macron et des propositions du Rassemblement National :
Annuler l’accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (CETA) ; renoncer à l’accord du Mercosur et protéger nos agriculteurs de la concurrence déloyale : le NFP est le seul parti à vouloir sortir des accords de libre échange, contrairement au gouvernement Macron et à l’extrême droite.Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales.Lutter contre l’accaparement des terres et permettre à chaque agriculteur qui souhaite s’installer d’accéder à une exploitation pour préserver le modèle agricole familial.Soutenir la filière du bio et l’agroécologie, encourager la conversion en bio des exploitations en reprenant leur dette dans une caisse nationale et garantir un débouché aux produits bio dans la restauration collective. Après une année 2022 particulièrement difficile, la filière bio a besoin d’un soutien plus important de l’Etat et d’une meilleure communication sur les enjeux de santé et de lutte contre le changement climatique.Rétablir le plan Ecophyto, interdire le glyphosate et les néonicotinoïdes avec accompagnement financier des paysans concernés.
Pour rappel, le gouvernement Macron a mis le plan Ecophyto en pause en février 2024, à contre courant de nos objectifs climatiques et de sortie progressive des pesticides.
Le renouveau des services publics
Le programme du Nouveau Front Populaire est le seul à vouloir investir massivement dans les services publics. C’est une priorité, et cela dès l’introduction du programme dans les 15 premiers jours :
Nous adopterons immédiatement 20 actes de rupture pour répondre à l’urgence sociale, au défi climatique, à la réparation des services publics, à un chemin d’apaisement en France et dans le monde. Pour que la vie change dès l’été 2024
Le programme propose ainsi de :
Organiser une conférence de sauvetage de l’hôpital public afin d’éviter la saturation pendant l’été, proposer la revalorisation du travail de nuit et du week-end pour ses personnels.Redonner à l’école publique son objectif d’émancipation en abrogeant le « choc des savoirs » de Macron, et préserver la liberté pédagogique.Faire les premiers pas pour la gratuité intégrale à l’école : cantine scolaire, fournitures, transports, activités périscolaires.
Il est également proposé d’accélérer la rénovation des bâtiments publics (écoles, hôpitaux, etc). Une mesure qui devrait être reprise par tous les partis politiques, pour la santé et le confort des Françaises et Français. Rappelons que l’empreinte carbone des services publics représente un poste important d’émissions et que l’Etat doit montrer l’exemple dans la décarbonation de notre système.
Sur le financement du programme du Nouveau Front Populaire
Il y a des questions légitimes sur le financement du programme du Nouveau Front Populaire. Comment les propositions seront financées, et quelles sont les sources qui permettent de justifier leur faisabilité ?
Le brouhaha médiatique est impressionnant depuis l’annonce du programme. Une heure après que les premières mesures soient publiques, Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, avait déjà décrété que ce programme était “une catastrophe”, “un délire total”. Des éléments de langage qui sont depuis répétés en boucle sur tous les plateaux TV et par les opposants politiques du NFP, et qui semblent fonctionner.
Ces critiques sont récurrentes. Les mêmes existaient déjà lors des élections européennes 2024, lors des législatives 2022 alors que le programme de la NUPES était soutenu par plus de 170 économistes… Vous pouvez remonter longtemps dans le temps puisqu’en 1945, la droite avait déjà les mêmes propos sur la sécurité sociale et son impossible financement.
3 programmes, 3 mondes
Pour bien analyser la situation, il faut analyser les trois programmes. Celui du Rassemblement National, du gouvernement Macron et du Nouveau Front Populaire.
Le programme du Rassemblement National
Le programme du Rassemblement National n’est soutenu par aucun économiste sérieux, n’est pas justifié ni précis, et les erreurs répétées par les figures du Rassemblement National laissent penser qu’ils ne maitrisent absolument pas l’économie.
Manque de chance pour Jordan Bardella et Marine Le Pen, on ne peut pas répondre “c’est de la faute de l’immigration” à la question “combien va coûter la baisse de la TVA sur l’énergie ?”, mesure qu’ils souhaitent et qui est par ailleurs illégale.
Le programme économique du RN est tout sauf “protecteur pour les Français”. Il est aussi libéral que le programme du gouvernement Macron, il y aura les mêmes coupes de dépenses dans les services publics, avec un accent xénophobe plus prononcé.
Le programme économique du gouvernement Macron
Puisque Bruno Le Maire critique le programme du NFP, peut-être devrions nous rappeler le bilan du gouvernement Macron depuis 7 ans.
Premièrement, si le programme du NFP risque “une explosion de la dette“, que dire du gouvernement et de sa politique actuelle avec une explosion de la dette record et ses 1000 milliards de dette en 7 ans ? La crise Covid ne peut justifier seule cette envolée.
Ce mercredi 19 juin 2024, l’Union Européenne a par ailleurs recommandé d’ouvrir une procédure pour déficit public excessif contre la France. Il semblerait que les bons gestionnaires ne soient pas vraiment du côté du gouvernement Macron.
160 milliards de subventions
Depuis deux jours, le gouvernement Macron considère que le programme du NFP coûterait 300 milliards de plus par an. Dans le même temps, la socialiste Valérie Rabault a estimé le chiffrage du programme à 106 milliards d’euros de dépenses nouvelles sur la période 2024-2027.
Sans juger du chiffrage de Valérie Rabault, notons que niveau précision, le gouvernement Macron avait chiffré que la taxe sur les superprofits des producteurs d’électricité rapporterait 12,3 milliards d’euros. Au final, elle a rapporté 600 millions (source : Cour des Comptes, page 17, via François Malaussena).
Mais pour mettre ces chiffres en perspective, nous pouvons par exemple rappeler que selon les estimations, il y a 160 à 200 milliards d’aides publiques aux entreprises sans exigence de contrepartie. Non seulement les aides publiques peinent à montrer leur efficacité, mais les aides vers des entreprises polluantes et qui n’ont pas de plan concret de décarbonation se comptent en milliards.
C’est donc cela, le bilan des 7 ans du gouvernement Macron : hausse des inégalités et de la pauvreté en France, une croissance en berne et une économie loin de suivre le chemin nécessaire à la décarbonation du pays afin de respecter nos objectifs climatiques. Ainsi, le gouvernement Macron est-il vraiment en posture de donner des leçons d’économie ?
Le Programme du Nouveau Front Populaire est-il finançable ?
Contrairement au programme du Rassemblement National, le programme du Nouveau Front Populaire est soutenu par de nombreux économistes, à l’instar du prix Nobel d’économie Esther Duflo. C’est un argument d’autorité qui ne devrait jamais suffire à valider un programme, mais cela devrait suffire à répondre à la remarque “personne de sérieux ne peut soutenir ce programme”.
Ce programme tranche nettement avec le programme économique du gouvernement Macron et celui du Rassemblement National, dans la mesure où taxer les plus aisés n’est plus un gros mot, mais un souhait assumé.
Les chiffrages dépendront des scénarios pris en compte. Par exemple, pour le rétablissement de l’ISF, c’est environ 15 milliards de recettes, avec certains scénarios qui estiment 30 milliards. La réforme de l’impôt sur les héritages dorés, c’est environ 10 milliards de recettes. La suppression des niches fiscales inefficaces, injustes et polluantes : 3,5 milliards de recettes.
L’économiste Anne-Laure Delatte a apporté plusieurs précisions importantes quant aux idées reçues en cas d’application du programme :
L’exil fiscal n’est plus une fatalité : le dispositif de l’exit tax permet de collecter l’impôt des contribuables qui quittent la France pour échapper à l’impôt, cela est possible depuis l’échange automatique d’informations entre fiscs.L’ISF > 5 millions d’euros concernerait moins d’1% de la population. Le patrimoine des 500 plus grandes fortunes de France est passé de 250 à 1200 Mds euros en 15 ans.La France a besoin de nouvelles recettes fiscales pour réduire son déficit, réparer ses services publics (hôpital public, école) et engager des dépenses d’avenir (université). En résumé : il n’y a aucun argument économique rationnel contre cet impôt.
Mais au delà de l’aspect comptable, l’analyse de Romaric Godin sur Médiapart est très juste :
“L’offensive sur le caractère « irréaliste » ou « impossible » des financements des programmes est un piège conservateur qui tente de réduire la politique à des choix comptables et d’écarter toute remise en cause de l’ordre existant. Mais l’heure oblige à fixer des priorités en dehors des cadres financiers.“
“Rien d’important n’a jamais été fait de façon « finançable ». Aucune transformation majeure ne s’est souciée d’une norme de finance, précisément parce que ces normes sont construites pour empêcher la possibilité d’une quelconque transformation sociale. Respecter le cadre financier, c’est respecter d’abord la hiérarchie sociale existante“
Enfin, prenez 4 mn de votre temps et écoutez cette intervention de l’économiste Michael Zemmour qui parle du programme du Nouveau Front Populaire et de sa faisabilité, qui est injustement mis dos à dos avec celui du Rassemblement National :
Les éléments apportés ci-dessous devraient permettre de recentrer les débats. Non seulement le programme n’est pas “irréalisable” comme certains aiment le prétendre, mais il est surtout plus réaliste que le programme économique du Rassemblement National et celui du gouvernement Macron dont le bilan catastrophique devrait suffire à conclure tout débat.
NB : d’après nos informations, des précisions seront apportées d’ici le 30 juin par le Nouveau Front Populaire quant au chiffrage des mesures proposées. Un chiffrage “entre l’estimation de la socialiste Valérie Rabault et le chiffre farfelu de Renaissance de 300 milliards“, déclare une source proche du NFP.
Pour approfondir ces sujets, deux articles :
Conclusion : le programme du nouveau Front Populaire est-il à la hauteur ?
Le programme du Nouveau Front Populaire est de très loin celui qui permettrait le mieux de respecter les objectifs climatiques de la France.
L’atténuation des émissions, l’adaptation, la justice sociale, la biodiversité.. tous les sujets cruciaux sont au cœur du programme, qui est une réelle rupture par rapport à la politique menée par le gouvernement Macron et celle que propose l’extrême droite.
Ce programme n’est pas parfait, et il faudra attendre plus de précisions, c’est certain. Mais il serait bienvenu de voir les médias questionner l’extrême droite et le gouvernement comme ils le font pour le Nouveau Front Populaire. C’est grâce au débat que des précisions seront apportées, des précisions nécessaires pour éclairer le vote des Français afin de choisir l’avenir du pays pour les prochaines années.
Source link : https://bonpote.com/synthese-et-analyse-du-programme-du-nouveau-front-populaire/
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Publish date : 2024-06-20 09:25:18
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