l’essentiel
Secrétaire national du Parti socialiste, Sébastien Vincini a joué un rôle clé dans les négociations du Nouveau Front Populaire (NFP). Pour La Dépêche du Midi, le président du conseil départemental de Haute-Garonne revient sur ces pourparlers et affirme que pour gouverner, le NFP devra « élargir sa majorité et bâtir des alliances ».
Vous êtes l’un des architectes du Nouveau Front Populaire (NFP). Dans quel état d’esprit avez-vous abordé ces négociations ?
Dimanche soir, nous avons d’abord ressenti une grande satisfaction grâce au score de Raphaël Glucksmann. Mais cette euphorie a rapidement été interrompue par l’annonce de la dissolution de l’Assemblée. C’est là que nous avons décidé de nous réunir pour mesurer l’ampleur du moment et nous préparer. À cet instant, j’ai pensé que l’Histoire nous jugerait si nous échouions à créer l’union.
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Comment se sont organisées ces négociations ?
Nous étions divisés en 3 groupes de discussions : un premier sur les grandes orientations du NFP, qui réunissait les chefs de partis, un deuxième sur la répartition des circonscriptions, dont j’ai fait partie, et un troisième sur le contenu du programme. Toutes ces négociations ont été ardues.
Quelles étaient vos lignes rouges ? Lundi, au micro de France Bleu Occitanie, vous laissiez entendre que les socialistes avaient notamment « fait pression tout le week-end » contre l’investiture d’Adrien Quatennens (retirée depuis).
Nous avions plusieurs lignes rouges. D’abord, nous ne voulions pas d’une réédition de la Nupes, qui aurait abouti sur un simple accord d’appareil dominé par La France Insoumise. Dans le même esprit, il était hors de question que Jean-Luc Mélenchon devienne Premier ministre. Il est devenu trop « radioactif ». Ensuite, nous avons exigé le rétablissement d’un climat serein à l’Assemblée. Il fallait mettre fin à cette brutalisation incessante du débat public. L’Ukraine a aussi été une question importante sur laquelle nous n’avons rien lâché.
Adrien Quatennens a été désavoué, il ne sera plus candidat. Nous avons des lignes rouges. Ce n’est pas parce que nous avons fait un accord que l’on doit se compromettre. pic.twitter.com/j2wPSA4aYj
— Sébastien Vincini (@SebVincini) June 17, 2024
Sur le cas Quatennens, notre ligne a été claire : certes, nous nous unissons, mais nous ne soutiendrons jamais son investiture. Il était impensable pour nous de nous compromettre sur ce point. J’assume pleinement d’avoir fait pression pour retirer sa candidature.
Comment parvient-on à une alliance avec une extrême gauche qui n’a eu de cesse de critiquer ses alliés tout au long de la campagne des Européennes ?
Le contexte exigeait de nous une prise de conscience et un sens des responsabilités. Personne ne voulait être celui qui ferait obstacle à la formation d’une digue contre le Rassemblement national. Et puis, en partant divisés, nous savions pertinemment que nous n’avions aucune chance.
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Estimez-vous vraiment que cette répartition des forces est équitable ? On peut légitimement en douter, étant donné le nombre de circonscriptions attribuées à LFI.
Je pense que nous avons atteint un réel équilibrage territorial et politique. LFI, lors de la Nupes, était clairement dominante, c’est un fait. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas : les Insoumis ont négocié 226 circonscriptions (contre plus de 300 en 2022, Ndlr), alors que nous, les socialistes, avons obtenu 175 circonscriptions contre 70 en 2022. Certes, les Insoumis ont le plus grand nombre de sortants, mais je pense que nous avons atteint un véritable point d’équilibre.
En Haute-Garonne, il faut reconnaître que LFI s’est tout de même taillé la part du lion : 6 des 10 candidats investis par le Nouveau Front Populaire sont issus de la formation de Jean-Luc Mélenchon…
Au niveau national, la répartition est bien plus équilibrée que cela ! De plus, si nous voulions parvenir à un accord, il fallait que les sortants soient préservés de chaque côté. En prenant l’exemple de Toulouse, c’est cette réalité qui s’est imposée.
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Que dites-vous aux 3,4 millions d’électeurs socialistes qui ont le sentiment que vous avez pactisé avec l’extrême gauche ?
Que nous assumons nos responsabilités devant l’Histoire. À aucun moment je n’ai eu l’impression de me fourvoyer lors de ces négociations. Je le répète : l’enjeu était trop crucial. Nous devions nous unir et ériger une barrière contre le RN. Aux électeurs, je dis que nous avons accompli notre devoir, comme nous l’avions fait en 2002 en appellant à voter pour Jacques Chirac.
On a vu cette semaine les bisbilles entre responsables insoumis. Pensez-vous que LFI complique la tâche du Nouveau Front Populaire ? Voire le parasite ?
Je ne le crois pas. Quand on voit le spectacle lamentable qu’ont donné la droite républicaine (l’alliance Ciotti-RN, Ndlr) et la majorité présidentielle, je trouve que nos dissensions autour d’une dizaine de circonscriptions ne sont pas significatives.
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Comment envisagez-vous l’avenir du NFP ? Cette alliance peut-elle survivre à ces élections législatives ?
Nous devrons continuer cet effort de rassemblement. Si nous obtenons la majorité, nous devrons renouer avec les corps intermédiaires. Nous ne pourrons pas nous confiner éternellement dans cette logique de partis. Je pense également qu’il nous faudra élargir cette majorité et bâtir des alliances pour gouverner.
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Le programme du NFP est accusé par ses adversaires d’être dispendieux. Que leur répondez-vous ?
Je leur réponds que notre programme fait l’objet d’un chiffrage précis, à la différence de celui du RN. Et je leur rappelle également qu’en taxant seulement à 2 % les 500 plus grandes fortunes françaises, nous récoltons déjà 50 milliards d’euros. Mais ces critiques ne me surprennent pas, c’est un procès que l’on fait régulièrement à la gauche depuis 1981.
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Publish date : 2024-06-20 04:45:00
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